Signes d'appel en langage oral

Certains enfants peuvent présenter des difficultés de développement du langage, ce qui peut avoir des répercussions sur leur vie quotidienne et leur réussite scolaire. À partir de quand faut-il s’inquiéter ? Vers qui se tourner ?

Si vous observez certains des signes indiqués ici, il est conseillé d’utiliser un test de repérage. Il est également conseillé de consulter un orthophoniste. Parlez-en aux parents afin qu’ils demandent l’avis de leur médecin, et se procurent, suivant ses recommandations, une prescription médicale pour un bilan orthophonique de la communication et du langage oral.

Il existe quelques facteurs prédictifs de troubles du langage à partir de cet âge.

  • L’enfant ne parvient pas à combiner deux mots. Par exemple, il ne produit pas de petites phrases courtes comme « papa parti » pour « papa est parti ».
  • Il semble avoir des difficultés à vous comprendre ou à comprendre ses proches.
  • Il n’utilise pas de geste pour communiquer et il n’imite pas les mouvements corporels.
  • Par ailleurs, l’enfant a plus de difficulté que les autres enfants de son âge à répéter des mots qu'il ne connaît pas ou des pseudo-mots, surtout lorsqu'ils sont longs. Les pseudo-mots sont des mots qui n'existent pas, mais dont la structure ressemble à celle de mots existants dans la langue, par exemple « capi » ou « ratou ».

Soyez vigilant en particulier s’il existe des antécédents de problèmes de langage ou d’autres troubles dans la famille, par exemple la dyslexie-dysorthographie, les troubles du spectre de l’autisme, les troubles envahissants du développement, l’épilepsie, etc. Ce sont des facteurs de risque de trouble du langage chez les jeunes enfants.

La présence fréquente d’otites séro-muqueuses est un facteur aggravant les troubles du langage chez le jeune enfant. Dans ce cas, il est conseillé de vérifier son audition auprès d’un ORL.

L’enfant risque de présenter un trouble du langage sévère s’il fait preuve de difficultés d’ordre linguistique.

 

  1. Au niveau phonologique

L’enfant semble avoir des difficultés de perception phonologique. Il a des difficultés réceptives en phonologie, ce qui signifie qu’il a des difficultés à traiter les sons de la parole.

  • Ces difficultés peuvent être objectivées par des tâches de discrimination phonologique. Par exemple, lorsqu’on lui demande « "comme" et "gomme", est-ce que c’est pareil ou pas pareil ? », il répond « pareil ». Il est à noter que ces tâches sont parfois difficiles à mettre en œuvre chez les patients les plus jeunes.
  • Ces difficultés peuvent également être objectivées par des tâches de jugement phonologique. Par exemple, lorsqu’on présente l’image d’une gomme et qu’on demande à l’enfant s’il s’agit du mot « comme », il répond « oui, c’est correct ».

L’enfant semble avoir des difficultés phonologiques lorsqu’il s’exprime à l’oral.

  • Son répertoire de phonèmes, c’est-à-dire de sons qu’il peut prononcer de manière isolée, est incomplet.
  • Il n’est pas ou peu intelligible.
  • Il déforme les mots. Par exemple, il oublie une partie du mot, ou il remplace les sons dans les mots.
  • Il ne fait pas toujours les mêmes erreurs et peut produire le même mot de différentes manières. Par exemple, il peut dire « papin », « pinpin, « palin » pour « lapin ».
  • Ses erreurs ne ressemblent pas à celles des autres enfants.
  • Il a plus de difficulté que les enfants de son âge à répéter des mots qu'il ne connaît pas ou des pseudo-mots, surtout lorsqu'ils sont longs. Les pseudo-mots sont des mots qui n'existent pas, mais dont la structure ressemble à celle de mots existants dans la langue, par exemple « capi » ou « rativor ».

 

       2. Au niveau lexico-sémantique

L’enfant semble avoir des difficultés à comprendre des mots.

 

       3. Au niveau morphosyntaxique

L’enfant semble avoir des difficultés de compréhension morphosyntaxique. Autrement dit, il ne comprend pas bien les phrases.

Il a tendance à s’aider du contexte et de la situation pour comprendre. Par exemple, s’il entend « mets tes chaussures bleues », il peut le comprendre, car il reconnaît le mot « chaussures », il voit que vous êtes près de la porte (indiquant qu’il est temps de sortir), et il sait par habitude que pour sortir, il doit mettre ses chaussures bleues. Mais s’il entend « range tes chaussures dans le placard », il peut avoir des difficultés à le comprendre, car il ne saisit pas le sens de « range » ou de « placard », si vous n’êtes pas près du placard et ne le pointez pas du doigt.

L’enfant semble avoir des difficultés de production morphosyntaxique.

  • Il fait beaucoup d’erreurs sur le genre des mots, il confond « la » et « le ». Par exemple, il peut dire « le maman » et « la chat ».
  • Son langage est télégraphique. Il ne conjugue pas les verbes et il oublie des mots dans ses phrases.
  • Il fait des phrases très simples, voire trop simples pour son âge.
  • C’est difficile pour lui de faire du lien entre ses énoncés.
  • Il fait des erreurs lorsqu’il répète des phrases.

Plus le nombre de domaines linguistiques touchés est élevé, plus le risque de persistance des difficultés est élevé. Par exemple, des difficultés touchant la phonologie, le vocabulaire et la morphosyntaxe ont plus de risque de persister que des difficultés ne touchant que le vocabulaire et la morphosyntaxe.

 

       4. Au niveau non-linguistique

Des signes d’alerte non linguistiques sont également à prendre en compte.

  • L’enfant présente des troubles praxiques affectant la motricité bucco-linguo-faciale volontaire. Autrement dit, il est difficile, voire impossible, pour l’enfant de faire des « jeux de bouche » ou des « grimaces » sur demande, alors qu'il peut y arriver spontanément. Par exemple, il a du mal à simuler un bisou sur demande, mais il parvient à en faire un spontanément pour dire bonjour à sa grand-mère.
  • L’enfant présente un retard de communication gestuelle. Il n’utilise pas ou peu de gestes lorsqu’il communique. À noter que cette sous-utilisation de la communication gestuelle a tendance à s’inverser entre 5 et 10 ans chez les enfants avec un trouble développemental du langage (TDL). En effet, ces enfants ont alors tendance à davantage utiliser les gestes par rapport aux autres enfants.
  • L’enfant présente un retard dans le développement du jeu symbolique, c’est-à-dire le jeu où l’enfant fait semblant, « fait comme si » (il cuisinait, il dormait, il mangeait…). À noter qu’il ne s’agit pas d’un facteur systématique.

À cet âge, de nouveaux signes d'alerte doivent être pris en considération, en complément des signes d'alerte de la période précédente, qui demeurent pertinents. Les troubles risquent de persister si plusieurs domaines sont déficitaires.

 

  1. Au niveau phonologique

L’enfant a plus de difficulté que les enfants de son âge à répéter des mots qu'il ne connaît pas ou des pseudo-mots, surtout lorsqu'ils sont longs. Les pseudo-mots sont des mots qui n'existent pas, mais dont la structure ressemble à celle de mots existants dans la langue, par exemple « canopi » ou « rativor ». Il mélange les sons ou oublie une partie du mot.

La persistance des troubles phonologiques au-delà de 5 ans est un facteur de faible pronostic et s’accompagne généralement d’autres problèmes de langage.

 

       2. Au niveau lexico-sémantique

L’enfant semble avoir des difficultés à comprendre des mots.

L’enfant semble également avoir des difficultés à produire des mots :

  • Il cherche ses mots, a souvent « le mot sur le bout de la langue », fait beaucoup de pauses, utilise fréquemment des mots comme « machin » ou « truc ».
  • Il utilise souvent des périphrases : il fait une petite phrase au lieu d'utiliser un mot précis. Par exemple, il dit « ça coupe » au lieu de « couteau ».

 

       3. Au niveau morphosyntaxique

L’enfant semble avoir des difficultés à comprendre les phrases.

  • Il est difficile pour lui d’interpréter la signification des contrastes grammaticaux. Par exemple, l’enfant ne comprend pas la différence entre « La fille pousse le garçon » et « La fille est poussée par le garçon », ou la différence entre « le cahier est neuf, mais pas grand » et « le cahier est neuf et grand ».
  • Il est difficile pour lui de distinguer les énoncés grammaticalement corrects des énoncés grammaticalement incorrects.

L’enfant semble avoir des difficultés à produire des marques morphologiques.

Les marques morphologiques sont des éléments linguistiques qui donnent des informations grammaticales telles que le genre, le nombre, le temps, le mode, ou la personne dans un mot ou une phrase. Ces marques peuvent prendre différentes formes selon les langues et les systèmes grammaticaux. En français, par exemple, le son « d » à la fin de mots comme « grande » permet de signaler que l'on parle d’un mot féminin, tandis que le son « o » à la fin de mots comme « chevaux » indique que le mot est au pluriel. De même, le son « on » à la fin d'un verbe indique que l'action est réalisée par la première personne du pluriel, c'est-à-dire « nous ». En résumé, les marques morphologiques jouent un rôle crucial dans la structure grammaticale d'une langue en indiquant des informations sur les relations entre les mots dans une phrase.

  • Il a des difficultés à produire un énoncé en utilisant les marques grammaticales correctes. Par exemple, l’enfant n’utilise pas le futur pour compléter l’énoncé suivant : « Aujourd’hui, Tom roule à vélo ; demain, il … [roulera]. »
  • Ces difficultés peuvent également être observées lors d’une tâche de répétition de phrases.

Des compétences non verbales limitées peuvent également contribuer à un pronostic défavorable.

Certaines études établissent que ces signes d’appel sont valables dès 5-6 ans.

 

  1. Compréhension du discours

L’enfant ne comprend pas l’implicite. Par exemple, lorsqu’on lui dit « Papa a acheté un bijou à maman. Elle l’a essayé, mais son doigt est trop petit », il ne comprend pas que l’on parle d’une bague.

 

       2. Répétition

  • L’enfant a plus de difficulté que les enfants de son âge à répéter des mots qu'il ne connaît pas ou des pseudo-mots, surtout lorsqu'ils sont longs. Les pseudo-mots sont des mots qui n'existent pas, mais dont la structure ressemble à celle de mots existants dans la langue, par exemple « canopi » ou « ratifouvor ».
  • Les difficultés à répéter des phrases peuvent être un signe d’alerte de troubles du langage, notamment lorsque la grammaire n’est pas respectée.
    • Certains mots grammaticaux sont absents :
      • les pronoms personnels (il, elle) ;
      • les pronoms possessifs (mon, ma) ;
      • les pronoms relatifs (qui, que) ;
      • les conjonctions (mais, et, ou) ;
      • les prépositions (à, dans, par) ;
      • les déterminants (le, la, un, des).
      • Par exemple, l’enfant dit « le garçon promène la forêt » ou « Pierre donne bisou mamie ».
    • Des verbes sont incorrectement conjugués. Par exemple, l’enfant dit « les enfants a un goûter » ou « nous manger des pâtes ».

Lors du bilan orthophonique, la tâche de répétition de phrases est un bon marqueur clinique de trouble développemental du langage (TDL) en français (pour plus de détails, voir Courteau et al., 2023 ; Leclercq et al., 2014 ; Maillart et al., 2012).

 

       3. Production du discours

  • Il est difficile pour l’enfant de raconter un récit entendu ou de produire un récit à partir d’une séquence d’images.
  • Il est difficile pour lui d’organiser son discours.
  • L’enfant utilise peu d’outils de cohésion du discours.
    • Il emploie peu de connecteurs de temps (hier, aujourd’hui, demain, avant) et de connecteurs logiques (donc, parce que, mais).
    • Il a des difficultés avec les reprises pronominales. Par exemple, il a tendance à dire « le garçon réveille » ou « elle lave les mains ».

Enfin, l’enfant peut avoir des difficultés à apprendre « par cœur », à retenir les tables de multiplication et à apprendre des langues étrangères.

Chez l’adolescent, la présence d’un déficit morphosyntaxique est un marqueur de trouble du langage plus important que la présence d’un déficit lexico-sémantique. Les éléments listés ci-dessous sont les plus discriminants pour repérer un trouble développemental du langage (Courteau et al., 2023) :

  • L’adolescent échoue à une tâche de répétition de phrases.
  • Il ne parvient pas à classer des mots, c’est-à-dire à choisir deux mots qui vont logiquement ensemble et à expliquer leur relation. Par exemple, il trouve difficile de repérer « bateau » et « port » parmi les mots « bateau, tarte, chemise, port ». Ce type de tâche est plus pertinent chez les adolescents que les tâches lexico-sémantiques basées sur la compréhension d’un seul mot (comme le test de l’EVIP).
  • Il ne produit pas correctement l'accord sujet-verbe en nombre, pour les verbes dont la marque de nombre est audible à l’oral. Par exemple, il peut dire « Paul et Léa boit puis ils dort » au lieu de « Paul et Léa boivent puis ils dorment ».

Des difficultés d’utilisation du langage peuvent être suspectées dans les cas suivants :

  • L’enfant semble passif dans la conversation : il initie peu la conversation.
  • L’enfant communique majoritairement pour les mêmes raisons. Par exemple, il fait quasi uniquement des requêtes et des protestations. Ou bien, il formule quasiment toujours des réponses très brèves aux questions.
  • L’enfant prend la parole de manière inadéquate. Par exemple, il interrompt, ne répond pas au bon moment ou semble « à côté de la plaque ».
  • L’enfant ne semble pas s’adapter à ses interlocuteurs et à leurs connaissances. Par exemple, il peut avoir du mal à s'adapter au niveau de compréhension de ses camarades de classe, ou à leurs intérêts. Il peut essayer de discuter de sujets complexes en sciences, avec des enfants qui n'ont pas les mêmes connaissances, ce qui peut entraîner un manque d'intérêt ou de compréhension chez ses camarades.

Ces difficultés peuvent être la conséquence de difficultés langagières, mais peuvent aussi faire suspecter des difficultés de pragmatique.

 

La pragmatique désigne l’utilisation appropriée du langage dans des situations de communication réelles, en tenant compte du contexte et des attentes sociales. Il s’agit donc de la manière dont une personne utilise le langage dans des contextes sociaux et interactifs pour atteindre ses objectifs de communication. Les difficultés de pragmatique peuvent inclure des problèmes tels que la compréhension des indices sociaux non verbaux, la prise de tour de parole, le respect des règles implicites de la conversation, l'adaptation du langage en fonction du contexte, etc.

 

Les difficultés langagières orales peuvent avoir des conséquences dans d’autres domaines.

  • Des problèmes en mémoire verbale. À court terme, l’enfant a des difficultés à retenir des séquences de sons ou de mots. À long terme, apprendre « par cœur », retenir les tables de multiplication, raconter un livre lu, ne sont pas des tâches faciles.
  • L’enfant peut développer des difficultés attentionnelles.
  • Il peut également avoir une grande fatigabilité pour le traitement de l’information verbale.

Les difficultés langagières orales peuvent s’accompagner de difficultés neuropsychologiques concernant par exemple l’attention, l’inhibition et la planification.

Les troubles du langage peuvent être associés à certaines conditions biomédicales, en particulier les lésions cérébrales, l’épilepsie, les pathologies neurodégénératives, la paralysie cérébrale, les troubles neurosensoriels (par exemple, la surdité), les syndromes génétiques (par exemple, la trisomie 21), les troubles du spectre de l’autisme ou encore la déficience intellectuelle.

Références